Sous prétexte de traditons, des pratiques mutilantes sont pratiquées...
Pour ces choses - y compris les génocides - les prises de consciences se font sur qq années - dizaines d'années et les changements s'opérent avec des procès collectifs qui apportent des prises de
conscience....
Le phénomène est loin d'être marginal ; entre 100 et 200 millions de femmes sont victimes de mutilations sexuelles féminines dans le monde. Parmi les populations immigrées en France, 35000 jeunes
femmes sont, chaque année, fortement exposées au risque de mutilation. Des pratiques aux conséquences sanitaires et sociales très lourdes, qui ont amené l'Institut Théramex, ainsi que des
associations, à s'intéresser à ce problème de santé publique.
Le terme de mutilations sexuelles féminines (MSF) regroupe l'excision et l'infibulation, tout en laissant apparaître la connotation sexuelle qui s'y rattache, puisque l'objectif de cette
mutilation est précisément d'interférer dans l'activité sexuelle de la femme. L'excision, c'est l'ablation, par le biais d'un instrument tranchant, de l'appareil génital externe de la femme,
c'est-à-dire le clitoris et une partie des petites lèvres. Dans 15 % des cas, cette mutilation s'associe à ce que l'on appelle une infibulation. L'infibulation comporte une excision complétée par
l'ablation d'une partie ou de l'ensemble des grandes lèvres, et surtout la suture, par des fils de lin ou de chanvre, des deux parties bord à bord, de manière à ce que la cavité vulvo-vaginale
soit rétrécie, pour laisser la place à un minuscule orifice par lequel s'écoulent à la fois l'urine et le sang des règles. Donc, dans ces conditions, du moins dans les premiers temps, les
rapports ne sont pas synonymes de plaisir. Ces mutilations ont donc évidemment de terribles conséquences sur la vie sexuelle des jeunes femmes qui les ont subies.
La santé de ces jeunes filles ?
Les conséquences sont nombreuses, souvent graves et peuvent être mortelles. Les conséquences immédiates sont multiples : la douleur tout d'abord, qui est brève, intense, insoutenable et peut,
parfois, susciter un état de choc. Les hémorragies sont possibles : la zone vaginale est très innervée et vascularisée, elle est donc très sensible et saigne énormément. Elles peuvent entraîner
la mort.
Il existe aussi des conséquences retardées : les infections sont fréquentes ; la plupart du temps, aucune précaution d'asepsie n'est prise lors de l'opération, ce qui peut provoquer des
phénomènes infectieux dont les conséquences sont mortelles ou extrêmement handicapantes.
A long terme, enfin, on observe une grande altération de l'activité sexuelle (ce qui fait partie des objectifs de la mutilation), des troubles psychologiques, ainsi que des douleurs résiduelles.
On peut également assister à des formations locales de kystes ou à une prédisposition aux infections urinaires et génitales. Mais surtout, les jeunes femmes sont confrontées à des difficultés au
moment des rapports sexuels et à de grosses complications lors de l'accouchement. En effet, lors de la désinfibulation, il reste une grande zone cicatricielle, la sortie de l'enfant peut donc
entraîner des lésions locales qui peuvent toucher le vagin, le rectum et la vessie. Afin d'éviter certaines complications dues à la pratique "sauvage" de l'excision, on a envisagé de la réaliser
de manière chirurgicale, mais ce n'est pas une véritable solution. La médicalisation de l'excision est certes une solution immédiate qui en supprime les conséquences néfastes, mais c'est aussi
une façon de la reconnaître comme acceptable. Ce qui aurait l'effet inverse de la démarche que nous tentons de mettre en place.
Existe-t-il une chirurgie réparatrice ?
Oui, et c'est assez nouveau, j'y fait allusion dans le livre "monologue érotique". Depuis quelques années, des urologues ont mis au point une chirurgie concernant les lésions directes de
l'excision. Une chirurgie réparatrice aboutissant à remettre en situation normale les terminaisons nerveuses au niveau du vagin et du clitoris. L'opération se déroule sous anesthésie générale, ne
dure qu'une demiheure et les suites opératoires sont plutôt légères. Une vraie réussite qui n'est pratiquée que dans quelques centres en France.
Une évolution de la situation est-elle possible ?
Le problème lié aux mutilations sexuelles féminines est complexe. Cette pratique vient du fond des âges. Nous n'avons pas de véritable réponse sur la question des origines de cette coutume. La
seule motivation profonde semble être le maintien de la femme dans une situation de dépendance vis-à-vis de l'homme. Mais là où réside la perversité du système, c'est que la transmission de la
coutume se fait par les femmes ellesmêmes, sous l'influence indirecte des hommes. Pourtant, depuis quelques années, il y a un mouvement qui se dessine dans les pays africains, au Burkina Faso en
particulier, avec une prise de position forte de la part des femmes des présidents et des grands parlementaires de ces pays. Ils ont mené une réflexion en collaboration avec les associations de
défense et les chefs religieux, qui a abouti à une prise de conscience progressive ; il semble qu'il y ait une diminution du nombre des excisions. En revanche, la situation française est bien
différente. La France est une terre d'accueil où vivent beaucoup de communautés originaires des différents pays où se pratiquent ces mutilations. Elles vivent en vase clos et n'ont plus une vue
précise de l'évolution des mentalités dans leur pays d'origine. Cette situation de repli fait que, paradoxalement, les immigrants ont tendance à maintenir la tradition pensant que celle-ci est
encore en valeur.